Economie : CAMWATER, vers l’adoption de nouvelles mesures pour lutter contre l’eau non facturée
janvier 31, 2023Quelques semaines seulement son élection au poste de premier vice-président de l’Association Africaine de l’Eau (AAE) pour l’Afrique Centrale au cours du mois de novembre 2022, M. Blaise Moussa, Directeur Général de la CAMWATER, a ouvert un colloque international sur la gestion des sociétés d’eau sur le thème « Viabilité financière des sociétés d’eau en Afrique : maîtrise des pertes commerciales et des fraudes sur le réseau d’eau potable », les jeudi 26 et vendredi 27 janvier 2023 à Yaoundé.
Les responsables des sociétés de gestion de l’eau en Afrique, les responsables de l’AAE, les partenaires au développement, les experts des questions d’eau et d’assainissement, les élus locaux, les investisseurs et autres acteurs du secteur étaient réunis dans l’optique de baliser les contours d’un nouveau modèle des sociétés de production et distribution de l’eau potable et des questions liées à l’assainissement.
Ces travaux se tiennent en effet dans un contexte où à l’échelle mondiale de manière générale, et plus particulièrement dans les pays en développement, les sociétés de distribution d’eau potable sont confrontées à des défis majeurs tels que celui de l’Eau Non Facturée (ENF) qui se définit comme étant la différence entre le volume d’eau potable émis dans le réseau de distribution et celui effectivement facturé aux consommateurs.
Les sources du problème
M. Sylvain Usher, représentant du président de l’Association Africaine de l’Eau (AAE), a clairement remis le problème dans son contexte de manière à pouvoir ressortir les sources liées ces pertes à gagner lorsqu’il s’exprimait en ces termes :
« Vous produisez 1000 litres d’eau et vous distribuez ces 1000 litres d’eau. Pour produire ces 1000 litres d’eau vous utilisez des produits chimiques pour rendre l’eau potable. Donc l’eau qui va sortir de l’usine est une eau qui coûte de l’argent. Et vous distribuez cette eau là aux populations et vous espérez lorsque vous distribuez ça aux populations, vous allez les facturer ; vous allez facturer 1000 litres parce que vous avez produit 1000 litres. Et en fin de compte lorsque vous faites vos bilans sur 1000 litres, vous avez facturé 500 litres mais où sont passés les 500 litres qui ont été fabriqués dans l’usine et qui n’ont pas été comptabilisés dans les compteurs du client ?
Ces 500 litres ont soit été perdus dans le réseau parce qu’il y a des trous dans le réseau et donc l’eau a disparu. Ces 500 litres d’eau n’ont pas été facturés parce qu’il y a de la fraude, il y a des gens qui ont consommé de l’eau sans que ça passe par les compteurs. Il y a de fortes chances aussi que cette eau en question soit perdue parce qu’il y a eu par exemple un feu quelque part, on a utilisé des bornes à feu et bien-sûr ces bornes à feu on ne les paie pas puisque l’eau qui est là dedans sert à éteindre le feu.
Donc on a produit 1000 litres et on a perdu 500 litres en chemin mais quand on met ça sur les grandes quantités, on amène alors à avoir des eaux non facturées qui peuvent avoisiner les 40,50%. Et on a besoin de plus d’eau pour alimenter les nouvelles populations puisque les villes grandissent, l’urbanisation galopante, c’est quelque chose d’important en Afrique et où est ce qu’on va chercher cette eau si on est entrain de perdre la moitié de ce que nous produisons ? »
Pistes de solutions
L’interview de M. Blaise Moussa, Directeur Général de la CAMWATER et Vice-Président de l’AAE, a permis d’identifier des pistes de solutions qui seront partagées et discutées avec les autres pays au cours de ces travaux. Il s’exprimait en ces termes :
« Nous pouvons d’avantage élaborer des hypothèses parce que nous voulons que des réponses plus appropriées soient apportées, basées sur l’expérience en partage. C’est cela qui est recherché. C’est un colloque mais c’est d’avantage par ailleurs un atelier, c’est un rendez-vous du donner et du recevoir.
Les solutions sont connues ; on parle on parle de sectorisation, il faut découper les zones pour les mitiger. Il faut maintenant digitaliser et c’est pourquoi CAMWATER s’en va vers la digitalisation à la fois pour avoir les centres techniques pour contrôler les unités de productions, pour contrôler les réseaux qui vont devenir intelligents, les compteurs intelligents pour une meilleure facturation mais détecter les fuites pour les réparer rapidement.
Il faut dire par ailleurs que nous avons évoqué la nécessité d’avoir une alliance citoyenne autour de l’eau. Que les consommateurs et autres, soient d’avantages plus établis dans un système d’approvisionnement de l’eau qui est suffisamment supporté par l’Etat parce que, c’est plus subventionné.
L’eau n’est jamais vendue au prix coûtant, c’est toujours moins ou plus à la moitié du prix de production. Et quand les pertes viennent à intervenir soit du fait des déficits techniques, du fait des éléments volontaires notamment les cas de vandalisme, les cas de fraudes, le problème devient beaucoup plus important. Il faut que chacun au-delà des infrastructures physiques soit un bon partenaire pour que le système d’approvisionnement en eau potable soit solidaire et équitable.
C’est l’une des hypothèses qui n’est pas souvent envisagée parce vous avez certainement pensé à ce que soit le tout technologique mais, l’eau est d’abord une denrée à consommation humaine, les hommes doivent être solidaires et dans cette solidarité ils doivent être de bonne volonté et de bonne foi. »
Félix Eyebe © Mbolo Cameroon
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